- Très bien ; nous pouvons alors débuter l'audience. Alors, mademoiselle Bones, racontez nous comment s'est déroulée la soirée du 26 septembre.
- J'ai juré de dire toute la vérité et c'est ce que je ferais.
Je repris mon souffle en appliquant la méthode respiratoire calmante que mon père m'avait apprise. Refoulant les larmes qui me montaient aux yeux, je commençais mon récit, en essayant d'être la plus attendrissante possible :
- C'était mon anniversaire. Papa avait décidé de m'emmener à un restaurant italien très côté pour fêter ça. Je suppose que maintenant qu'il est mort je peux le dire ; il avait travaillé pour la Mafia Italienne pendant quelques années, et il habitait en Italie. Mais quand il est tombé amoureux de maman, il a légué sa place de chef mafieux au plus calme de sa troupe et ils sont partis en France. J'avais toujours voulu qu'il me raconte ces folles aventures, mais il n'avait jamais voulu, jusqu'à ce fameux 26 septembre. Soudainement, après qu'il ait parlé d'un certain Segnorini ou je ne sais plus quoi, qui serait très cruel... Et bien, ce fût comme si je dormais debout. Je n'entendais plus, ,je ne pensais plus, je ne voyais plus. Vous allez me croire folle mais j'ai juré de dire toute la vérité. J'ai eu vaguement conscience de mes jambes qui marchaient, puis plus rien. Et c'était comme si je me réveillais en plein cauchemar : sa chemise imbibée de sang. Le poignard dans ma main. La sirène de la police qui hurle. Puis le fer autour de mes poignets.
Puis j'éclatais en sanglots.
- Par pitié, je vous en supplie... Je ne l'ai pas tué, jamais je n'aurais fait ça ! Il ne me restait plus que lui comme famille... Mon jumeau est mort quand j'avais neuf ans, puis c'était au tour de ma mère quand j'avais quatorze ans. Je suis seule maintenant ! Je trouverais bien une preuve de mon innocence quelque part !
J'aperçus derrière mes larmes les jurés discuter avec les avocats et le juge, m'écartant de ma propre histoire et me faisant revenir dans mes souvenirs...
*
J'avais quatorze ans. Je faisais de l'accrobranche avec maman. Nous riions ensemble en effectuant le circuit rouge, à dix mètres du sol.
- J'avais peur que ce circuit soit trop compliqué pour moi, mais finalement ça va ! Et puis, je sais que les poulies me tiennent. Tu me donnerais l'énergie de décrocher la lune, Océane !
Elle se retourna précautionneusement vers moi, qui était derrière elle sur le ponton de rondins tournants, et me prit chaleureusement dans ses bras ; je lui rendis son étreinte.
Je t'aime, ma fille. Tu es ce que j'ai de plus précieux. Je serais toujours avec toi, et je t'aiderais à traverser les épreuves qui te feront face. Tu es la seule qu'il me reste.
Mon cœur se serra, et je lui murmurais :
- Moi aussi je t'aime.
Après le ponton de rondins tournants, il y avait un endroit avec une corde de tarzan : le but était de, en restant attaché à la passerelle, de se jeter sur la corde de Tarzan, puis d'attacher les mousquetons dessus, puis de se jeter sur le filet en face et de s'attacher au filet. Il y avait un panneau « Une personne à la fois ».
- Je passe la première ! S'exclama ma mère, joviale.
Elle s'avança sur le ponton et s'élança gracieusement sur la corde, puis s'attacha.
Je tournais la tête pour admirer le lac qui s'étendait à ma gauche, quand ma mère hurla. Je la regardait et vit, horrifiée, que la corde s'effilochait.
- Maman ! Hurlais-je. Lance-toi sur le filet !
Elle me regarda, les yeux agrandis par la terreur, puis se lança sur le filet... Qu'elle rata de peu, tandis que la corde lâchait. Je la vit atterrir en bas, et je savais déjà que cette chute de dix mètres lui serait fatale.
- Maman !
Je descendis par l'échelle de secours à toute allure ; les teneurs du camp arrivèrent en même temps que moi.
- Je ne comprends pas, dit un vieil homme qui devait être proche de la retraite. Elle était pourtant bien attachée...
Il agrippa la corde.
- Vous trouvez ça normal ? Hurla-t-il. Cette corde aurait dû être changée depuis plusieurs mois ! Vous venez de briser une famille, bande d'inconscients !
Il me prit par l'épaule.
- Désolée petite, mais c'est la fin. Toutes mes condoléances. Je comprend tout à fait ce que tu ressens. C'est leur faute, il paieront pour ça.
Me tendant un téléphone portable, le vieil homme me dit d'appeler un membre de ma famille pour que quelqu'un vienne me chercher. J'appelais alors mon père, la seule famille qui me restait, sans savoir qu'il ne lui restait que quatre ans à vivre.
*
Les jurés, ainsi que les avocats et le juge, se levèrent et reprirent leur place. Le juge prit la parole, faisant résonner sa voix hautaine mais juste dans toute la salle d'audience.
- Mademoiselle Borcelli, nous avons quelque chose à vous montrer. Quelqu'un a une vidéo de votre meurtre et nous l'a envoyée. Approchez vous.
J'étais menottée et ils n'avaient donc rien à craindre. Je m'avançais et regardais les images qui s'affichaient sur l'écran de l'ordinateur. Il y avait un jeune couple aux visages floutés qui venaient de se marier qui étaient filmés ; derrière, on pouvait clairement me voir, le regard vide, poignarder mon père.
Je prenais ma tête entre mes mains et pleurais. Ce n'était pas possible...
- Nous avons prit notre décision annonça le juge.
Je baissais la tête connaissant la réponse. Ils avaient toutes les preuves qu'ils leur fallait pour me mettre en taule.
- Vous êtes en effet coupable du meurtre ; mais nous nécessitons d'une autre audience pour déterminer certaines choses. Vous allez donc retourner dans votre cellule pendant deux semaines, le temps de préparer votre seconde audience. Une objection ?
Je levais la main.
- Monsieur le juge, je vous réclame le droit d'être avec une fille de mon âge en cellule, sinon je mourrais de solitude des suites d'une grave dépression.
Je ne voulais pas être seule ; je voulais avoir quelqu'un à qui raconter la vie et mes malheurs. Je croisais les doigts.
- Permission accordée, dit-il.
Je lui adressais un triste sourire et le remerciais.
- la sentence étant prononcée, je déclare cette première audience terminée.
*
Le même camion me ramena à la prison où ils me ramenèrent dans la même cellule que la dernière fois. Je protestais en disant que le juge m'avait accordé la permission d'être avec une fille de mon âge.
- Ola, ne vous inquiétez pas ! Nous devons juste vous trouver une camarade. Je vous jure que cet après midi on vous transférera.
Il me donna ma ration du midi et ferma la porte à clé derrière lui, me laissant seule dans l'ombre.
- J'ai juré de dire toute la vérité et c'est ce que je ferais.
Je repris mon souffle en appliquant la méthode respiratoire calmante que mon père m'avait apprise. Refoulant les larmes qui me montaient aux yeux, je commençais mon récit, en essayant d'être la plus attendrissante possible :
- C'était mon anniversaire. Papa avait décidé de m'emmener à un restaurant italien très côté pour fêter ça. Je suppose que maintenant qu'il est mort je peux le dire ; il avait travaillé pour la Mafia Italienne pendant quelques années, et il habitait en Italie. Mais quand il est tombé amoureux de maman, il a légué sa place de chef mafieux au plus calme de sa troupe et ils sont partis en France. J'avais toujours voulu qu'il me raconte ces folles aventures, mais il n'avait jamais voulu, jusqu'à ce fameux 26 septembre. Soudainement, après qu'il ait parlé d'un certain Segnorini ou je ne sais plus quoi, qui serait très cruel... Et bien, ce fût comme si je dormais debout. Je n'entendais plus, ,je ne pensais plus, je ne voyais plus. Vous allez me croire folle mais j'ai juré de dire toute la vérité. J'ai eu vaguement conscience de mes jambes qui marchaient, puis plus rien. Et c'était comme si je me réveillais en plein cauchemar : sa chemise imbibée de sang. Le poignard dans ma main. La sirène de la police qui hurle. Puis le fer autour de mes poignets.
Puis j'éclatais en sanglots.
- Par pitié, je vous en supplie... Je ne l'ai pas tué, jamais je n'aurais fait ça ! Il ne me restait plus que lui comme famille... Mon jumeau est mort quand j'avais neuf ans, puis c'était au tour de ma mère quand j'avais quatorze ans. Je suis seule maintenant ! Je trouverais bien une preuve de mon innocence quelque part !
J'aperçus derrière mes larmes les jurés discuter avec les avocats et le juge, m'écartant de ma propre histoire et me faisant revenir dans mes souvenirs...
*
J'avais quatorze ans. Je faisais de l'accrobranche avec maman. Nous riions ensemble en effectuant le circuit rouge, à dix mètres du sol.
- J'avais peur que ce circuit soit trop compliqué pour moi, mais finalement ça va ! Et puis, je sais que les poulies me tiennent. Tu me donnerais l'énergie de décrocher la lune, Océane !
Elle se retourna précautionneusement vers moi, qui était derrière elle sur le ponton de rondins tournants, et me prit chaleureusement dans ses bras ; je lui rendis son étreinte.
Je t'aime, ma fille. Tu es ce que j'ai de plus précieux. Je serais toujours avec toi, et je t'aiderais à traverser les épreuves qui te feront face. Tu es la seule qu'il me reste.
Mon cœur se serra, et je lui murmurais :
- Moi aussi je t'aime.
Après le ponton de rondins tournants, il y avait un endroit avec une corde de tarzan : le but était de, en restant attaché à la passerelle, de se jeter sur la corde de Tarzan, puis d'attacher les mousquetons dessus, puis de se jeter sur le filet en face et de s'attacher au filet. Il y avait un panneau « Une personne à la fois ».
- Je passe la première ! S'exclama ma mère, joviale.
Elle s'avança sur le ponton et s'élança gracieusement sur la corde, puis s'attacha.
Je tournais la tête pour admirer le lac qui s'étendait à ma gauche, quand ma mère hurla. Je la regardait et vit, horrifiée, que la corde s'effilochait.
- Maman ! Hurlais-je. Lance-toi sur le filet !
Elle me regarda, les yeux agrandis par la terreur, puis se lança sur le filet... Qu'elle rata de peu, tandis que la corde lâchait. Je la vit atterrir en bas, et je savais déjà que cette chute de dix mètres lui serait fatale.
- Maman !
Je descendis par l'échelle de secours à toute allure ; les teneurs du camp arrivèrent en même temps que moi.
- Je ne comprends pas, dit un vieil homme qui devait être proche de la retraite. Elle était pourtant bien attachée...
Il agrippa la corde.
- Vous trouvez ça normal ? Hurla-t-il. Cette corde aurait dû être changée depuis plusieurs mois ! Vous venez de briser une famille, bande d'inconscients !
Il me prit par l'épaule.
- Désolée petite, mais c'est la fin. Toutes mes condoléances. Je comprend tout à fait ce que tu ressens. C'est leur faute, il paieront pour ça.
Me tendant un téléphone portable, le vieil homme me dit d'appeler un membre de ma famille pour que quelqu'un vienne me chercher. J'appelais alors mon père, la seule famille qui me restait, sans savoir qu'il ne lui restait que quatre ans à vivre.
*
Les jurés, ainsi que les avocats et le juge, se levèrent et reprirent leur place. Le juge prit la parole, faisant résonner sa voix hautaine mais juste dans toute la salle d'audience.
- Mademoiselle Borcelli, nous avons quelque chose à vous montrer. Quelqu'un a une vidéo de votre meurtre et nous l'a envoyée. Approchez vous.
J'étais menottée et ils n'avaient donc rien à craindre. Je m'avançais et regardais les images qui s'affichaient sur l'écran de l'ordinateur. Il y avait un jeune couple aux visages floutés qui venaient de se marier qui étaient filmés ; derrière, on pouvait clairement me voir, le regard vide, poignarder mon père.
Je prenais ma tête entre mes mains et pleurais. Ce n'était pas possible...
- Nous avons prit notre décision annonça le juge.
Je baissais la tête connaissant la réponse. Ils avaient toutes les preuves qu'ils leur fallait pour me mettre en taule.
- Vous êtes en effet coupable du meurtre ; mais nous nécessitons d'une autre audience pour déterminer certaines choses. Vous allez donc retourner dans votre cellule pendant deux semaines, le temps de préparer votre seconde audience. Une objection ?
Je levais la main.
- Monsieur le juge, je vous réclame le droit d'être avec une fille de mon âge en cellule, sinon je mourrais de solitude des suites d'une grave dépression.
Je ne voulais pas être seule ; je voulais avoir quelqu'un à qui raconter la vie et mes malheurs. Je croisais les doigts.
- Permission accordée, dit-il.
Je lui adressais un triste sourire et le remerciais.
- la sentence étant prononcée, je déclare cette première audience terminée.
*
Le même camion me ramena à la prison où ils me ramenèrent dans la même cellule que la dernière fois. Je protestais en disant que le juge m'avait accordé la permission d'être avec une fille de mon âge.
- Ola, ne vous inquiétez pas ! Nous devons juste vous trouver une camarade. Je vous jure que cet après midi on vous transférera.
Il me donna ma ration du midi et ferma la porte à clé derrière lui, me laissant seule dans l'ombre.
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